mardi 26 janvier 2010

L'importance du symbolisme dans le nazisme justifie le questionnement sur Wolfsburg

Dans mes posts précédents, j'ai développé étonnement et malaise devant le choix surprenant fait pour renommer après la guerre la ville créée par Hitler pour accueillir l'usine Volkswagen : Wolfsburg - du nom de l'animal qui l'a symbolisé toute sa vie (très nombreuses références développées : la plus forte étant sans doute le nom de son QG en Prusse Orientale où il passa la quasi totalité de ses 2 dernières années : la tanière du loup). Ainsi c'est une évidence rappelée dans la plupart des ouvrages sérieux : Hitler s'assimilait en tout point à un loup.

J'ai également répondu à une question : n'est-ce pas là un détail, malheureux certes, mais qui ne vaudrait pas qu'on s'y attarde davantage ? Je comprends qu'on pense cela, mais m'étant replongé dans des ouvrages racontant l'expérience absolument terrifiante que fut le nazisme, je ne le pense pas, et je souhaiterais développer ce dernier aspect - non évoqué dans mes précédents posts - qui expliquera la motivation des actions ultérieures nécessaires (auprès de Volkswagen, de l'État allemand et de la ville de Wolfsburg), et dont je ne manquerai pas de vous tenir au courant.

Sur la force du symbole du loup : je cite un extrait du blog de Françoise Delvaux : La symbolique du loup – extraits : "Un de ses plus terribles avatars modernes nous parvint par le biais du nazisme. Quand nous associons nazis et loups, nous obéissons en fait à une volonté délibérée des nazis eux-mêmes. Pour éviter les références judéo-chrétiennes, le Reich et ses mystiques ont abondamment puisé aux mythologies germaniques, au sein desquelles loups, loups-garous et autres hommes-bêtes occupent une place de choix. En Bavière par exemple, région-berceau du Parti par excellence, les croyances en la Horde Sauvage ont toujours été vivaces). Les photos et documents filmés de l'époque hitlérienne nous montrent des loups stylisés ornant quantité d'oriflammes et de tambours, mais plus intéressant encore est d'apprendre qu'un commando chargé, à la fin de la guerre, de dépister et massacrer les traîtres au Führer prit pour nom Werwolf Oberbayern : le Loup-garou de Haute-Bavière, revivifiant ainsi le mythe de la plus horrible façon".

En effet, un aspect qui frappe quand on replonge dans les livres traitant du système nazi et qu'on oublie forcément car on n'a plus ce type d'exemple devant nos yeux, fort heureusement, c'était l'accent absolu mis sur le symbolique. Plusieurs exemples me viennent à l'esprit : l'obligation du salut nazi en toute circonstances et pour tous (les réfractaires étant passibles des camps ...), le symbole de la croix gammée (rappelons qu'elle reprenait un symbole indien de la roue de la vie, mais en inversant le sens afin de symboliser le chaos). L'omniprésence des SA d'abord puis des SS ensuite dans la vie civile. Les cérémonies de Nuremberg filmées par Leni Riefenthal montrent 500 000 personnes assistant au froissement de chaque drapeau nazi - plusieurs dizaine de milliers - avec les 16 drapeaux "sacrés" représentant les 16 morts du putsch raté de Munich pour communiquer leur force. On pourrait multiplier les exemples à l'infini (rôle du serment, ....).

Le symbolisme n'était pas accessoire au système Nazi mais essentiel : c'est justement grâce à ces symboles très forts que Hitler et le parti Nazi ont pu prendre le contrôle total d'un des peuples les plus civilisés au monde pour l'entraîner dans un projet inédit par son amoralisme et sa violence. August von Kageneck, dans son livre : "Lieutenant de Panzers, j'avais dix-huit ans quand je pénétrai en Russie comme lieutenant de Panzers" - depuis marié à une française écrit : "au départ, je voulais écrire ce livre pour rendre impossible le retour d'une pareille tragédie, puis voyant la rapidité de la réconciliation franco-allemande, je l'ai écrit pour faire comprendre comment et pourquoi l'Allemagne est devenue 12 ans durant la honte du genre humain .... Il montre, dans une famille de noble plutôt méfiants sur Hitler, le rôle de l'endoctrinement non par la pensée ou les idées mais simplement par les défilés incessants où sont "invités" les enfants dans des tenue para- militaires. Il est évidemment très difficile de résister longtemps sous peine d'arrestation. Après plusieurs années de lavage de cerveau, les jeunes étaient prêts à mourir pour leur Führer. Écoutons ce qu'il dit sur le fait qu'il reproche aux SS d'avoir copié la tête de mort des Panzers : "Étrange attraction que celle qu'ont toujours exercée la mort et ses symboles sur les Allemands. Les Germains portaient la tête de mort sur leur étendards ... C'est par les hussards à la tête de mort ... que nous est venu ce symbole ... strictement réservé aux équipages de chars ... Orgueil de classe ... certainement ... Dans un régime qui poussait le culte de l'élite à outrance ... On avait le droit de partir le premier à l'attaque ... L'insigne de notre arme signifiait moins la mort que nous voulions porter que celle que nous étions prêts à recevoir". Étonnant !

August von Kageneck perdit 2 de ses frères durant la guerre. Il compare l'expérience du nazisme à une expérience très en vogue après la guerre dans l'Allemagne détruite : le Rotor. Les gens rentraient dans des rotors géants et se faisaient "lessiver" et sortaient du rotor titubant. Il compare l'expérience du nazisme au rotor, le symbolisme ayant servi à faire entrer les gens dedans avant la vitesses explosive d'anéantissement.

Un dernier point moins connu sur Hitler : on connait tous la naissance de son sentiment raciste pan-germanique dans un empire austro-hongrois multi-ethnique où l'allemand n'était pas la seule langue. Quel paradoxe étonnant quand on se souvient qu'un an avant d'être nommé Chancelier, Hitler était apatride (il avait renoncé à la nationalité autrichienne pour ne pas être expulsé suite à des arrestations et condamnations multiples). On sait tous également que son chemin de l'anonymat absolu (début des années 20) vers Chancelier du Reich (un peu plus de 10 ans plus tard) fut semé de meurtres, crimes, intimidations et complots de toute sorte.

Une question demeure : certes, mais comment un tel parcours fut-il possible ? bien sûr, ses talents d'orateur, sa mémoire extraordinaire, une grande intelligence et compréhension de ses adversaires l'a grandement servi. Le contexte aussi. En 1928, il n'avait aucune chance. En 1931, avec 8 millions de chômeurs en plus et un discours démagogique, les choses étaient très différentes. Mais là n'est pas l'essentiel. Il est de notoriété publique que c'est l'adhésion d'Hitler à la société de Thulé (sorte de franc maçonnerie allemande - cf ouvrage de Philippe Valode : Hitler et les sociétés secrètes) qui lui conféra soutien de toute sorte - lui évitant de trop lourdes condamnations et lui donnant les informations nécessaires pour faire chanter Von Papen et l'amener à le nommer Chancelier. Cette confrérie prônant la supériorité de l'être Aryen convenait parfaitement aux idées racistes d'Hitler, décuplées par son échec à l'école des beaux arts de Vienne (jury autrichien et juif);

Le 3ième Reich n'a pas été qu'un empire - éphémère certes - classique. Cela a été un exemple quasi-unique à ce point d'expérience quasi mystique et démoniaque. Et au coeur de ce symbolisme, un homme : Hitler s'assimilant à un animal : Le Loup.
Voici pourquoi je fais le choix - discutable, j'en conviens, mais réfléchi de poser cette coïncidence (et les nombreuses autres - cf mes précédents posts), sur la table de l'histoire.